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Savoir-faire maritimes

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Savoir-faire maritimes

« Notre mission en matière de PCI est de réaliser la photographie la plus claire possible d’un savoir-faire traditionnel depuis ses origines, au travers de témoignages, et de s’appuyer sur le métier actuel afin d’en valoriser les pratiques. C’est une co-construction faite avec les acteurs pour choisir ce qu’il convient de mettre en place. »

Morgane Dallic

responsable du pôle valorisation du territoire et chargée de mission valorisation du patrimoine culturel immatériel

MISSIONS

« Quand l’aubépine est en fleur, la morgate arrive » : ce dicton traduit les liens ténus, entre terre et mer, entretenus par les habitants du Golfe du Morbihan avec leur environnement naturel. Chaque année en avril, la seiche commune entre dans le Mor Bihan, la petite mer, pour pondre ses œufs avant de mourir. C’est la période où les pêcheurs déposent leurs casiers pour la piéger. Longtemps délaissée, la pêche professionnelle de la morgate est devenue l’une des plus importantes pour les marins sur sinagos. Cette pratique, objet de toutes les attentions du Parc naturel régional du Golfe du Morbihan, s’inscrit dans l’inventaire des métiers et savoir-faire traditionnels, mis en œuvre dans le cadre d’un appel à projet du ministère de la Culture et de la Communication.
L’objectif pour le PNR est de rassembler et d’améliorer la connaissance du patrimoine culturel immatériel sur son aire géographique et de réaffirmer l’identité du territoire par le biais d’actions de réhabilitation, sans vision passéiste, mais en accompagnant et coordonnant les initiatives locales.

« Depuis des siècles, les ressources maritimes et rurales du Golfe du Morbihan ont conduit ses habitant.e.s à s’adapter au territoire pour les exploiter, participant ainsi à en modeler les paysages. Le lien entre l’humain et son environnement naturel est intime. Pensons à la navigation, à l’agriculture, à la conchyliculture, à la meunerie… », commente Morgane Dallic, chargée de mission valorisation du patrimoine culturel au PNR. « Nous abordons la notion de patrimoine culturel immatériel sous un angle environnement. Il ne s’agit pas de sanctuariser ce qui se pratiquait autrefois, mais de relier ces activités économiques à l’utilisation des ressources actuelles de notre territoire. Nous nous intéressons aux évolutions socio-économiques et à l’impact environnemental sur une pratique ».

Parmi les savoir-faire transmis de génération en génération qui intéressent le PNR, citons les activités de passeurs qui assurent les traversées, de pêche à la palourde et les activités vitivinicoles.
La pêche à la palourde, pratiquée à pied depuis des millénaires, au départ par des femmes et des enfants dans un but nourricier, s’est professionnalisée progressivement au cours des années 1990, avec le développement spectaculaire de la palourde japonaise. Cette pêche professionnelle s’exerce à pied : à sec sur les vasières ou en plongée, mais également sur un bateau au moyen d’une drague. Si cette activité de pêche connaît un déclin, en raison de la baisse des ressources et du nombre des pêcheurs, la transmission de ce savoir-faire perdure. « Le marquage de la palourde reste un métier emblématique et une pratique qui respecte le milieu : une valorisation économique ».

Face aux enjeux rencontrés, les métiers évoluent et parfois disparaissent. Tel est le cas pour la vinification du vin blanc du vignoble de Rhuys touché par le phylloxera à partir de 1903. Pour rappel, le plan breton détruit par l’oïdium au début des années 1860, fut remplacé par la folle Blanche B. Le vignoble de Rhuys fut un fournisseur important des distilleries bordelaises et charentaises, lorsque les vignobles du Bordelais et du Cognac furent frappés par le phylloxera, en 1866 et 1872. Sarzeau, en son temps, a distillé ses propres alcools : eau de vie de Rhuys, Cognac de Rhuys ou encore Fine Champagne de Rhuys. Aujourd’hui, la volonté est de valoriser ce long passé viticole qui a marqué les paysages, l’économie et la culture du pays, avec la réimplantation de vignobles, projet communal de Sarzeau.

Valoriser un territoire naturel fragile, mais habité, en confortant la dynamique humaine tout en préservant les paysages s’impose. Sur les quarante dernières années, la population a été multipliée par deux et les espaces urbanisés par huit.
Une des priorités est d’assurer un développement soutenable du territoire par la mise en cohérence des politiques publiques, depuis l’organisation du territoire jusqu’à la conservation et la gestion du patrimoine, dans une logique de développement durable, de préservation, de sauvegarde et d’amélioration de la biodiversité, de la qualité de l’eau…
Autant d’enjeux environnementaux qui, pour le PNR, doivent intégrer les activités professionnelles et de loisirs, en les articulant. Citons la pêche à pied : « Avec le plus gros spot de pêche en France, soit un millier de pêcheurs le même jour sur le territoire, nous avons la nécessité de transmettre les bonnes pratiques », explique Morgane Dallic.
Soucieux de valoriser les processus, les activités, les savoir-faire qui répondent à des critères de gestion durable des ressources, le PNR propose une labellisation aux entreprises vertueuses : « la marque Parc, label d’excellence ».

La fragilité de la biodiversité de ce territoire rural et maritime, s’illustre par la figure symbolique que le PNR a choisi pour incarner ses valeurs et ses activités : l’hippocampe. Le cheval de mer est en effet sensible à la qualité des eaux et des herbiers des prairies marines du Golfe qui dépendent de l’activité sur terre : « Celui-ci vit dans la petite mer ou Mor Bihan, dépendant des nutriments apportés par le continent. Abondant autrefois, il serait plus rare aujourd’hui et symbolise l’impérieuse nécessité de préserver le Golfe du Morbihan », mentionne la chargée de mission.

Christine Barbedet – avril 2016