Auteur : Hugo Melchior
Bien qu’extérieurs à l’usine du Joint Français implantée à Saint-Brieuc, les militants de la LC jouèrent dans ce conflit usinier inscrit dans la mémoire collective bretonne un rôle remarquable, quoique méconnu, comme l’illustre la présence, à l’arrière-plan, du militant Édouard Renard sur la photo iconique prise le 6 avril 1972 par Jacques Gourmelen.
Les militants de la petite section briochine, soutenus par leurs camarades rennais et brestois, mirent toute leur énergie pour contribuer autant que faire se peut à la popularisation de la lutte afin que les salariés bénéficient d’un soutien tant matériel que moral de la part de la population.
Pour ce faire, ils furent à l’origine du lancement à l’échelle de la ville, dès le 17 mars 1972, d’un comité de soutien unitaire auquel prit part une bonne partie des partis de gauche, à l’exception du PCF très hostile, et des syndicats de paysans, tels la FDSEA et le CDJA. Les militants de la LC distribuèrent quotidiennement aux salariés du « Joint » en grève leur bulletin La Taupe. Celui-ci devint une sorte de « journal de bord de la grève ». Il permit d’informer les grévistes les plus actifs, regroupés quotidiennement devant l’usine occupée par les forces de l’ordre, de l’évolution de la lutte, tout en exposant leur propre lecture du conflit et leurs propositions, telles la mise en place d’un comité de grève élu, la montée au « Joint » pour l’encercler symboliquement, ou la perspective d’une grève régionale de 24 heures avec l’espoir que fleurissent en Bretagne comme ailleurs en France : « Un, deux, de nombreux “Joint” ».
Bien aidés par la présence tout au long de la grève d’un permanent de l’organisation, Jean Métais, un des responsables nationaux du « travail ouvrier », les militants de « la Ligue » prirent part aux innombrables collectes organisées dans la ville pour soutenir « l’effort de grève » des salariés, tandis que leurs homologues des autres sections bretonnes faisaient de même dans leurs villes respectives. Ils organisèrent à Saint-Brieuc, avec le comité de soutien, des événements festifs, tel le concert du chanteur anti-franquiste et libertaire Paco Ibáñes. Ils s’efforcèrent, enfin, avec leurs jeunes militants, de mobiliser les lycéens qui, chose inhabituelle, participèrent massivement aux manifestations de rue organisées à Saint-Brieuc.
À voir également :
- Les relations entre les militants de LIP et du Joint Français – Guillaume Gourgues
- Les droites bretonnes face à la grève – David Bensoussan
- An Taol lagad spécial Année 1972 : la grève du lait
- An Taol lagad spécial Année 1972 : les grèves des commerçants
- La grève du lait, une lutte féministe ?
- Les mémoires de la grève du lait
- Les acteurs de la grève du lait. Deux générations, trois parcours militants
- La grève du lait. Un Mai 68 paysan en Bretagne ?
- An Taol lagad spécial Année 1972 – La grève du Joint Français
- Jean Le Faucheur, chef de file des luttes sociales briochines
- La grande crise et le combat pour sauver les marais salants
- Julia Le Louarn, salariée au Joint Français