Un phénomène de violence politique : le FLB et l’ARB (1966-2000)
Auteur : Erwan Chartier
C’est dans un contexte mondial de décolonisation, de développement des luttes de libération nationale et de contestation parfois violente du système démocratique parlementaire occidental, que naissent en Bretagne, au début des années 1960, le Front de Libération de la Bretagne (FLB) et l’Armée républicaine bretonne (ARB), groupe dont le R allait se transformer en « révolutionnaire » durant la décennie suivante. Avec des effectifs non négligeables – plusieurs centaines de membres en quarante ans –, mais sans produire une idéologie cohérente, les FLB-ARB réussissent cependant à médiatiser un certain malaise breton.
La tentation de la violence
En matière de « lutte armée », la Bretagne peut se prévaloir d’une certaine antériorité par rapport à d’autres régions françaises, puisque le premier attentat a lieu en 1932. Cette année-là, le groupe nationaliste Gwenn-ha-du (« noir et blanc », les couleurs du drapeau breton), fait sauter, à Rennes, le monument symbolisant l’union de la Bretagne à la France.
Au sein du mouvement breton, la tentation de la violence politique se fait véritablement de plus en plus forte à partir de 1964. Le Mouvement pour l’organisation de la Bretagne est alors en proie à une importante crise interne, qui aboutit au départ d’un bon nombre des jeunes militants pour fonder l’Union démocratique bretonne, parti résolument à gauche.
Pour les jeunes nationalistes du MOB, la défense de la Bretagne, « les armes à la main », apparaît comme une nécessité et un moyen efficace pour développer la lutte politique. Ils ont pour modèle les Irlandais de l’Irish republican army (IRA) ou encore les Québécois du Front de libération du Québec (FLQ).
Les premiers attentats
Le sigle FLB apparaît pour la première fois sur un engin incendiaire placé dans les sous-sols de la perception de Saint-Brieuc le 18 juin 1966. L’ARB, elle, entre en scène le 13 juillet 1967 en détruisant un relais téléphonique transcontinental à Vigneux-de-Bretagne. Constitué d’abord de groupes indépendants, le mouvement s’unit et se dote d’un « État-major » et d’un Kuzul meur, ou « grand conseil » politique.
En janvier 1968, cinq bâtiments administratifs sont pris pour cible, essentiellement de perceptions d’impôt. Surtout, l’organisation « fête » son vingtième attentat de la manière la plus spectaculaire qui soit en s’attaquant à la caserne de la CRS 13 de Saint-Brieuc, dans la nuit du 28 au 29 avril 1968. De 1966 à la fin 1968, une quarantaine d’attentats matériels sont perpétrés en Bretagne. Mais ce premier FLB-ARB est rapidement démantelé par la police à la fin de 1968 et au début de 1969.
La présence d’ecclésiastiques parmi les prévenus, comme celle de membres de toute la société, interpelle l’opinion et inquiète le pouvoir gaulliste. « Curés, paysans, étudiants : on était tous là, résume Ronan Kerhousse. En prison, on était la Bretagne ! » Une certaine solidarité s’organise avec la création de l’association Skoazell Vreizh (« Secours breton »). Maintenus plusieurs mois en détention à la prison de la Santé, les militants bretons sont de plus en plus embarrassants au fur et à mesure de l’évolution de la situation politique. Élu Président de la République, Georges Pompidou règle le problème en amnistiant les prisonniers.
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