Le Liber Landavensis, au folio 81 v° (p. 181 édition Gwenogvryn Evans) donne le texte suivant :
Et propter aliam causam eo quod ipse Guidnerth et Brittones & archiepiscopus illius terræ essent unius linguæ et unius nationis quamuis diuiderentur spatio terrarum. & tanto melius poterat renuntiare scelus suum. & indulgentiam requirere cognito suo sermone.
« Et pour une autre raison, car Guidnerth lui-même et les Bretons et l’archevêque de cette terre étaient de la même langue et de la même nation, bien qu’ils fussent séparés par la distance des terres. Et il pouvait d’autant mieux proclamer son forfait et solliciter l’indulgence que son langage était connu. » (Traduction de Léon Fleuriot.)
Il s’agit de l’histoire de Guidnerth (ou Guednerth), un prince gallois qui, après avoir assassiné son frère Merchion, est envoyé outre-Manche, à Dol-de-Bretagne, par l’évêque Oudoceus (gallois moderne Euddogwy) pour y faire pénitence. Léon Fleuriot, qui a signalé cet épisode dans l’introduction de son Dictionnaire (1964, p. 13), fait remarquer que l’événement est sans doute daté de la seconde moitié du ixe siècle.
Ce témoignage est d’importance, car il montre l’intercompréhension entre locuteurs gallois et bretons à une époque où les anciens dialectes brittoniques (la lingua britannica) avaient déjà commencé à se différencier (breton-cornique d’un côté et gallois de l’autre). Le fait qu’Oudoceus soit réputé être né en Bretagne et être le fils du roi breton Budic peut expliquer cette pénitence imposée à Guidnerth outre-Manche. Saint Samson, le fondateur de Dol, a lui-même la réputation d’être venu de Grande-Bretagne.
Ce texte, on le voit, donne à la fois un témoignage sociolinguistique et des réminiscences des liens familiaux et politiques qui unissaient les Bretons, pris ici au sens général du terme.
Le Liber Landavensis ou Livre de Llandâf, du nom du siège de l’évêché près de Cardiff, au pays de Galles [PL1], est une compilation rédigée vers 1120-1129, avec des éléments qui remontent clairement du VIe au XIe siècle.