L’exil pour apprentissage
Alain Barbetorte, né vers 900-910, est le fils de Mathuedoï, comte de Poher et gendre d’Alain le Grand, dernier roi breton mort en 907.
Ses parents fuient les invasions normandes vers l’Angleterre, à la cour d’Edouard l’Ancien, roi du Wessex, sans doute entre 913 et 920. Il grandit auprès du futur roi carolingien Louis d’Outremer lui aussi en exil depuis 923 avec sa mère Edwige, fille du roi du Wessex.
Selon la Chronique de Nantes, Æthelstan, fils d’Edouard l’Ancien, protège les Bretons comme le prouverait sa décision de devenir le parrain d’Alain. La même chronique affirme que devenu adulte, Alain serait un modèle de courage doté d’une force surhumaine : « il aime chasser le sanglier et l’ours muni d’un seul bâton ».
En âge de se marier, il prend pour concubine Judith, sans doute de la famille du roi gallois Hywel Dda, (écrit Houuel Da à l’époque) allié du roi du Wessex et présent à sa cour entre 928 et 935. Cette union de deux personnes parlant des langues très proches a peut-être aussi une dimension diplomatique dans le but de renforcer les liens entre Anglo-Saxons et Gallois, mais elle permet aussi à Alain de renforcer ses prétentions au titre royal. Deux fils naissent, dont l’aîné est prénommé Hoel, le second Guérec.
Après l’échec d’un soulèvement de la Bretagne en 931 auquel participe Juhel Bérenger, comte de Rennes, Alain est contraint de se réfugier à nouveau chez son protecteur.
Un retour organisé
La mort du roi Raoul (15 janvier 936) permet à Louis d’Outremer de revenir sur le trône du royaume franc. De son côté Alain rentre en Bretagne et, après une campagne militaire, s’installe dans Nantes, désertée depuis une quarantaine d’années. Il ne peut reprendre le titre de roi alors que celui qui est au centre des événements, Hugues le Grand, est duc des Francs. Alain est ainsi le premier duc de Bretagne.
Il contrôle la Cornouaille, le Nantais (augmenté des pays de Mauges, Tiffauges et Herbauge au sud de la Loire en 941-942), le Vannetais et exerce une autorité indirecte sur le Nord qui est entre les mains de Juhel Bérenger.
Restauration des institutions
Afin de remercier l’abbaye de Landévennec pour le rôle diplomatique de son abbé lors de son retour, il lui accorde des biens dans le pays nantais dont Batz, qui deviendra le siège d’un prieuré.
Il entreprend la restauration du duché sur la base des comtés, anciennes institutions carolingiennes. Il s’entoure de fidèles comme le vicomte Diles surnommé « l’exilé de Cambrie ». Son fils Hoel est comte de Nantes. Le Breton Hesdren, précédemment évêque de Léon, est placé à la tête du diocèse de Nantes.
Une principauté à l’équilibre fragile
Inquiets du rapprochement entre le roi Louis et les Normands, Alain, Juhel Bérenger (« les Bretons » selon Flodoard) et Guillaume Tête d’Étoupe vont à sa rencontre à Rouen en 942 pour lui jurer fidélité. Puis accompagnent le roi dans l’Oise lors d’une expédition contre Hugues le Grand et Herbert de Vermandois la même année.
Des Normands profitent de dissensions avec Juhel Bérenger, en 944, pour attaquer Dol. Réconcilié avec Juhel Bérenger, Alain cherche à consolider son autorité par une alliance matrimoniale en épousant la sœur du comte de Blois. Un héritier, Drogon, naît, mais à la mort d’Alain en 952 son héritier n’a que 5 ou 6 ans.
La Chronique de Nantes place sa tombe à Nantes mais Joëlle Quaghebeur a émis récemment l’hypothèse qu’il pourrait avoir été enterré dans l’abbaye de Landévennec.