Les femmes font partie intégrante du travail minier à Huelgoat-Poullaouen. Comme dans de nombreux autres sites miniers de diverses époques et régions, elles s’occupent du cassage à la masse et au bocard du minerai, et surtout du lavage à l’eau des graviers (où l’on retrouve aussi des adolescentes). C’est un travail particulièrement harassant : de 8 à 16 heures par jour, les laveuses manipulent du minerai dans des eaux glaciales et particulièrement corrosives, tandis que les casseuses et bocardeuses respirent continuellement de la poussière de roche, entraînant de nombreux cas de tuberculose.
Ces mauvaises conditions de travail, ajoutées à la faiblesse des salaires, donnent lieu à un événement inédit en 1767. Alors que la direction tente de réduire leur salaire, les casseuses et laveuses de Poullaouen se mettent en grève. Malheureusement, nous ne connaissons cette histoire que par les lettres d’instructions envoyées par les actionnaires parisiens à la direction locale. Celles-ci traduisent le mépris de l’aristocratie pour les femmes en lutte, qualifiées d’« animaux », de « nation la plus paresseuse qu’il y ait » et leur révolte de « caprice ». Malgré l’absence de revenus et la tentative d’instrumentalisation de mineurs et fondeurs pour convaincre leurs épouses de retourner au travail, les ouvrières tiennent bon pendant six semaines, jusqu’à ce que la Compagnie craque et accepte de les rengager à leur ancien salaire.
Cette grève s’inscrit dans un contexte de rejet de la Compagnie, de ses valeurs et de ses cadres étrangers par la population basse-bretonne. Cette révolte est animée par un curé anti-industrialiste, qui va jusqu’à organiser une caisse de grève. Le caractère ruraliste et chauvin de cette grève en fait une révolte préindustrielle, ne s’apparentant que partiellement aux grands mouvements du XIXᵉ siècle industriel. Néanmoins, il pourrait bien s’agir de la première grève spécifiquement féminine de l’Histoire connue de nos sources, mais l’importance du rôle féminin dans le travail préindustriel pourrait indiquer qu’il y en a eu d’autres, mais dont nous n’avons pas conservé le récit, ou par des sources qui n’ont pas encore été étudiées.