Photographie : Gilles Pouliquen
SKRIVAÑ
ÉCRIRE
Anjela commence à lire puis à écrire en breton très tard, à plus de cinquante-cinq ans, avec une fringale inassouvie.
La ferme ne lui a laissé jusque-là, aucun répit.
Les heures passées à l’écriture sont volées au repos.
Elle a pris l’habitude de noter les idées sur un carnet qu’elle porte toujours sur elle. Si elle a l’esprit tourmenté par une idée, il lui faut l’écrire.
« Si toutefois je ne la saisis pas, elle s’en va dans le vent. Elle reviendra, mais sous une forme. »
[...] Ne skrivan ket gwerzennoù
a zaouzek troad
'N ur gontañ war va bizied
Met a zaouzek-ugent troatad...
hag ouzhpenn.
Va gwerzennoù, m'o skriv gant dir lemm
va falc'h
Andell hag andell e blev melen va Bro
An Heol a ra ganto barzhonegoù frondus
A zaskagn din va buoc'hed
en nozioù-goañv [...]
Je n'écris pas de vers de douze pieds
En comptant sur mes doigts
Mais de douze fois douze enjambées... et plus.
Mes vers, je les écris avec de l'acier tranchant
de ma faux
Andain après andain dans les cheveux blonds
de mon Pays
Le soleil en fit des poèmes aromatiques
Que mes vaches ruminent pendant les nuits
d'hiver
Extrait de « Barzhonegoù-noz, barzhonegoù-deiz » - Quatre poires - janvier 1966
Anjela Duval
Texte : Anjela Duval