Auteur : Philippe Le Stum / décembre 2016
Né en Grande-Bretagne au XVIIIe siècle, le mouvement néo-druidique est répandu aujourd’hui dans le monde entier. Dans le droit fil du néo-druidisme gallois, le néo-druidisme breton est apparu au tout début du XXe siècle, prenant bientôt une place considérable dans l’essor du mouvement breton. Plus discret aujourd’hui dans son expression publique, il est néanmoins toujours vivace et demeure une des expressions les plus originales de l’identité celtique contemporaine.
Les origines galloises
La romanisation et la christianisation entraînèrent la disparition du druidisme tant en Gaule que dans l’île de Bretagne. La transcription, au Moyen Âge, de traditions légendaires permit certes, en Irlande et au pays de Galles, de le sauver d’un complet oubli. Cependant, les spécialistes de la société celtique dénient au néo-druidisme d’être une résurgence du druidisme historique.
De fait, les diverses branches du néo-druidisme contemporain dérivent la plupart, en filiation plus ou moins directe, du Gorsedd Beirdd Ynis Brydain – « Gorsedd (ou « Assemblée ») des Bardes de l’île de Bretagne » – créé en 1792 par Edward Williams, dit Iolo Morganwg (1747-1846). Celui-ci, en mêlant des textes apocryphes à ses propres compositions littéraires et poétiques, élabora le règlement interne et le rituel de son organisation. Pour apprécier l’intérêt et peut-être les mérites du néo-druidisme, il n’est d’ailleurs pas nécessaire de lui attribuer la légitimité historique millénaire dont il se prévaut parfois. En le considérant seulement comme un mouvement philosophique, littéraire et idéologique moderne mais soucieux de conserver, comme un précieux héritage, certains pans du passé des nations – tels que la langue – on appréciera davantage son rôle dans l’affirmation, la défense et l’illustration poétique et littéraire de l’identité culturelle celtique, en Galles d’abord, puis en Bretagne.
Les premiers contacts avec la Bretagne
Pénétrant très largement les milieux intellectuels, la classe politique et jusqu’au clergé du pays de Galles, le néo-druidisme « gorseddique » s’acquit une place de premier plan dans le renouveau national et linguistique gallois, marqué par l’essor des eisteddfodau, festivals poétiques et musicaux de grande ampleur et très populaires. Les celtisants bretons eurent un premier contact avec le Gorsedd lors de l’eisteddfod d’Abergavenny en octobre 1838. Cinq d’entre eux y assistèrent, au premier rang desquels Hersart de La Villemarqué (1815-1895), qui s’apprêtait à publier le Barzaz Breiz. Invité, selon le rituel gorseddique, à pénétrer dans le cercle de pierre, La Villemarqué y reçut, sous le nom de Barz Nizon (« Barde de Nizon »), l’investiture bardique, accordée pour la première fois à un Breton du continent.