Si les églises de la zone de production des toiles bretagnes n’ont sans doute pas la richesse de celles du Léon, elles témoignent cependant de la prospérité relative du sud du diocèse de Saint-Brieuc au XVIIe siècle et plus encore au XVIIIe. Ainsi, il n’est pas anodin que la plupart de ces églises aient dû être rebâties pour être agrandies au siècle des Lumières : la croissance démographique permise par l’activité toilière l’impose, mais, surtout, les ressources financières des fabriques paroissiales le permettent. Ainsi, par exemple, celles de Loudéac, Trévé, Saint-Caradec, Le Quillio, largement modifiées au cours du XVIIIe siècle, pour ne citer que ces quelques exemples. Souvent l’on ne regarde pas à la dépense : à Loudéac, l’on reconstruit entièrement l’église en l’espace de quelques décennies, avant de la décorer de statues en marbre de Carrare que l’on fait venir tout spécialement d’Italie.
L’église, plus modeste, de Saint-Thélo est très significative de ces évolutions et, plus encore, de la place prise par les petites élites toilières dans ce processus : largement rebâtie dans le dernier tiers du XVIIe siècle et dans les premières années du XVIIIe siècle, elle abrite notamment un superbe retable baroque dans son collatéral sud, représentant la « belle mort » telle qu’on la conçoit alors. Dû à Guillaume Le Poder, il a été offert à la paroisse en 1676 par deux marchands de toile, Pierre Moulnier, sieur de Guerochoux, et Mathurin Rolland, sieur de Chasteau Rianc, qui ont probablement demandé à figurer sur le tableau central.
