L’ensemble mégalithique de Saint-Just

Auteur : Yannick Lecerf / décembre 2016
Cette petite commune située dans le sud de l’Ille-et-Vilaine offre aux visiteurs la possibilité de découvrir un vaste complexe mégalithique constitué de monuments à l’architecture diverse.

Un site tôt repéré

Dès 1846, prenant conscience de l’importance de ces structures lithiques, l’abbé Brune les insérait dans ses cours du Grand Séminaire de Rennes. Quatre ans plus tard (1850), Bachelot de la Pylaie comparait les pierres dressées aux alignements de la presqu’île de Crozon (29). Par la suite de nombreux érudits tentaient des interprétations jugées aujourd’hui surprenantes.
Les nombreuses prospections menées sur ce secteur mettaient en évidence l’étendue et la complexité d’un ensemble mégalithique aménagé sur les points culminants.

L’incendie de 1976 : un déclencheur

C’est seulement à partir de 1953 que les premières études scientifiques seront entreprises. Dégageant le long tertre de la Croix-Saint-Pierre, Pierre-Roland Giot mettait en évidence une structure datée de 2 500 ans avant J.-C.
Après une succession d’incendies sur la lande, les alignements du Moulin furent explorés et restaurés à partir de 1976 sous la direction de Charles-Tanguy Le Roux. Puis un second programme de recherche amenait Jacques Briard à entreprendre plusieurs chantiers. Simultanément débutaient les fouilles de Château-Bû, des tertres de la Croix-Saint-Pierre et de l’allée couverte de Tréal.

Des alignements

Les alignements du Moulin comptent trois files de menhirs. Deux sont orientées selon un axe est/ouest alors que la plus à l’ouest se place perpendiculairement aux deux autres.
La file du nord compte quinze blocs de quartz blanc. Elle s’étale sur une longueur de 115 m. Plusieurs de ces blocs semblent avoir été malmenés dès l’âge du bronze. Deux d’entre eux servent en effet de paroi à des petites tombes en coffre.
La file sud est plantée dans une sorte de chaussée constituée de pierres et de terre. Longue de 65 m, elle compte une douzaine de monolithes en schiste et un bloc de quartz.
Les deux grands foyers découverts dans la masse de la chaussée ont donné des dates anciennes de 4 730 à 4 380 ans avant J.-C. En plaçant cet ensemble au milieu du Ve millénaire avant notre ère, on apprend que le site était fréquenté dès les premiers temps du Néolithique. Dans la partie est de cette ligne, les restes de plusieurs calages de poteaux de bois laissent supposer la présence d’un édicule protégeant peut-être une sorte de sanctuaire.

Une grande poterie à quatre anses était enfouie vers la partie est de la chaussée. Il pourrait s’agir d’une inhumation cinéraire arrivée là au Néolithique final. En effet la datation au carbone 14 place cette urne dans une séquence chronologique comprise entre 2780 et 2180 avant J.-C.
L’intervention sur la ligne ouest orientée nord/sud s’est limitée à en faire un relevé de plan.

Alignements du moulin - Les blocs de quartz et de schiste des alignements du Moulin dominent le couvert végétal - Crédit : photo CPIE Val de Vilaine

Des cairns

Le tertre de Château-Bû, étudié à partir des années 1990, livre un dolmen à cabinets latéraux desservis par un couloir. Les sols sont dallés de plaques de schiste et l’ensemble se trouve inclus dans un cairn de pierre aux façades montées en parement. L’entrée de l’espace funéraire située dans la paroi est se reconnaît par la présence de son système de fermeture constitué de plusieurs dalles plantées. Deux sépultures adventices datées de l’âge du bronze sont venues s’incruster dans la masse du cairn. Elles se trouvent soulignées par la présence de gros monolithes de quartz blanchâtre.

La fouille archéologique du long tertre de la Croix-Saint-Pierre relève la présence de petits coffres irréguliers interprétés pour certains comme des possibles tombelles. Des calages de poteaux de bois ont été également reconnus dans la masse du cairn. L’ensemble, de forme quadrangulaire, apparaît ceinturé par un péristyle de petites dalles. Celles placées au nord sont en grande majorité en schiste bleu alors que celles du sud ont été choisies parmi des quartz blancs. La datation C 14 (2 500 ans avant J.-C.) obtenue lors de cette intervention place ce monument dans la séquence du Néolithique final.

Les petites buttes visitées dans le secteur de la Croix-Saint-Pierre se sont révélées être des dolmens à couloir inclus dans leur tertre tumulaire. Ces trois sépultures, proches dans leur conception, montrent pour l’une (dolmen sud) un couloir dallé excentré par rapport à la chambre. L’autre (dolmen nord), très entamée, laisse deviner son plan par la présence de quelques piliers plantés et des restes d’un dallage dans l’espace funéraire. La troisième (dolmen ouest), en partie protégée par son cairn résiduel de pierre parementée, est constituée d’une chambre dallée quadrangulaire ouverte sur un couloir où le dallage est absent. Le cairn subcirculaire est formé par deux masses concentriques soulignées par leur parement respectif.
Le mobilier archéologique exhumé de ces sépultures permet de les situer dans une séquence du Néolithique ancien (vers 5 000 ans avant J.-C.).

Le cairn de Château-Bû surmonté de monolithes de quartz blanchâtre - Photo musardise.com

Une allée couverte

La sépulture de Tréal se présente comme une grande allée couverte à entrée latérale. Construite sur le sommet d’une butte naturelle, elle voisine un imposant affleurement de schiste. Elle se présente comme un long couloir d’une quinzaine de mètres de long orienté selon un axe nord-ouest/sud-est. Les puissants piliers et les restes de sa couverture ont été récupérés dans un poudingue de Montfort. Cette roche grossière n’a pas favorisé la préservation de la construction. L’ensemble était à l’origine enchâssé dans un cairn constitué de pierre et de terre dont les limites sont encore perceptibles au sol. Le matériel archéologique sorti lors des travaux sur cette sépulture reste très limité. Il permet cependant de placer ce monument dans la phase finale du Néolithique.

Allée couverte de Tréal, l’imposante allée couverte de Tréal, longue d’une quinzaine de mètres Crédit : photo CPIE Val de Vilaine

Un sanctuaire

Les hommes du Néolithique, sédentarisés par l’élevage et l’agriculture, organisaient leur territoire. En déterminant des attributions spécifiques en fonction de divers critères topographiques et environnementaux, ils distinguaient des lieux de vie, des espaces funéraires ou des emplacements de pierres levées. Avec une telle concentration de monuments, on peut émettre l’hypothèse que ce secteur avait, pour les cultures néolithiques, un intérêt très particulier sans doute lié à des formes de spiritualité difficiles à cerner aujourd’hui. Quoi qu’il en soit, l’ensemble mégalithique de Saint-Just apparaît comme un des éléments majeurs du paysage culturel de la Bretagne.

CITER CET ARTICLE

Auteur : Yannick Lecerf, « L’ensemble mégalithique de Saint-Just », Bécédia [en ligne], ISSN 2968-2576, mis en ligne le 5/12/2016.

Permalien: https://bcd.bzh/becedia/fr/l-ensemble-megalithique-de-saint-just

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