L’ankou justicier

Auteur : Daniel Giraudon / novembre 2016

Parmi les représentations de l’Ankou en Basse-Bretagne, il en est un qui semble avoir plus marqué les esprits que les autres, c’est celui de Ploumilliau. C’est l’un des deux modèles sculptés dans le bois et le seul présent aujourd’hui encore dans une église. Son squelette décharné a donné lieu à un dicton bien connu en Trégor : Treut evel Ankou Plouillio, maigre comme l’Ankou de Ploumilliau. Le degré de familiarité entretenu naguère avec la mort en Bretagne et la dimension humaine de l’Ankou sont vérifiés par le surnom que l’on donne encore dans le pays à son effigie : Erwanig Plouillio, c’est-à-dire petit Yves de Ploumilliau. Ce n’est pas un hasard. Le rapprochement est immédiatement fait avec un homonyme notoire, saint Yves de Vérité, personnage également statufié et présent autrefois dans un petit oratoire à Trédarzec. En ce lieu éloigné du bourg se pratiquait une forme de culte parallèle au grand saint Yves de Tréguier, patron des hommes de lois. On allait le trouver pour obtenir réparation d’un grand tort. La demande de sentence était grave puisqu’il s’agissait ni plus ni moins que de vouer son ennemi à la mort, gwestlañ, comme on disait en breton. Le coupable se sachant ainsi voué, ne tardait pas à dessécher sur pied. Frappé d’une maladie languissante, il dépérissait de jour en jour et mourait à petit feu. Mais il fallait bien se garder d’accuser quelqu’un à tort car le châtiment se retournait contre celui qui avait faussement accusé son prochain. L’Ankou de Ploumilliau remplissait, lui aussi, ce même rôle de justicier avec les mêmes conséquences.

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Auteur : Daniel Giraudon, « L’ankou justicier », Bécédia [en ligne], ISSN 2968-2576, mis en ligne le 18/11/2016.

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