Chasser la loutre

Auteur : François de Beaulieu / mai 2024

À la fin du XIXe siècle, des amateurs de chasse à courre de l’Ouest, déçus de ne plus trouver de loups, ont introduit et sélectionné un griffon d’origine anglaise, l’Otterhound, qui, comme son nom l’indique (« chien de chasse à loutre »), était spécialisé dans la chasse aux loutres, très en vogue outre-Manche. Le récit publié par le comte Georges de Tinguy de Nesmy retrace ce que fut l’apogée de cette pratique trop minoritaire pour perdurer. Mais il existait une très longue tradition populaire de chasse de la loutre qui se maintint, elle, au-delà du milieu du XXe siècle.

Chasseurs de loutres à Port-Coton (Belle-île). Comme l’atteste cette carte postale, la chasse à la loutre était une attraction touristique à Belle-Île-en-Mer au début du XXe siècle, au même titre que celle des oiseaux de mer. Source : collections de l’écomusée de la Bintinais.

Elle était motivée, en grande partie, par la valeur de la peau, dont on disait que le prix d’une seule était égal au montant du salaire mensuel d’un ouvrier agricole. La méthode la plus répandue était le piégeage et on peut encore voir, ici et là, des pierres portant une encoche pour recevoir le piège, retenu à la rive par une chaîne. Certains chasseurs disposaient de chiens spécialisés qui débusquaient la loutre et la poursuivaient, elle était alors tirée au fusil, maintenue sous l’eau avec une fourche ou prise dans des filets. Les peaux étaient apportées aux fourreurs de la ville la plus proche ou vendues à la célèbre foire à la sauvagine de Guingamp. Certains chasseurs se flattaient d’en avoir pris plusieurs centaines. L’un des plus réputés, Marcel Quéméneur (1906-1998), de Bulat-Pestivien, fut aussi le dernier. Il entretenait une petite meute de six à huit chiens et cessa son activité en 1962.

 

 

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Auteur : François de Beaulieu, « Chasser la loutre », Bécédia [en ligne], ISSN 2968-2576, mis en ligne le 30/05/2024.

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