Le temps des batailles
Au Moyen Âge, sur la côte sud du Finistère, le duc de Bretagne veut pouvoir compter sur une place fortifiée ; la vocation militaire de « Conq-Kerne » est d’emblée affirmée. Le site de Concarneau est constitué d’un îlot rocheux, celui de Conq, isolé par la mer et les vasières dans l’estuaire du Moros. Au XIIIe ou au XIVe siècle (période indéterminée, une ceinture murale en pierre complète les défenses de l’île, la ville est close de murailles.
L’importance stratégique de Concarneau se traduit dans son statut : la ville était le chef-lieu d’une châtellenie ducale et à partir de 1355 elle est nommée parmi les places de guerre de Bretagne. En 1341 Jean de Montfort en confie la garde à une garnison anglaise qui n’en sera chassée qu’en 1373 par Bertrand Du Guesclin. Le récit des trois assauts successifs de ce siège laisse à penser que la muraille était suffisamment forte pour résister. Cependant au siècle suivant, la fortification a besoin de sérieux travaux. Entamés à partir du milieu du xve siècle, ils se poursuivent jusque sous les ducs de Bretagne Arthur III et François II. En 1489 la fortification est suffisante pour que les troupes du roi de France se voient opposer une résistance qui dure une quinzaine de jours.
Forteresse au milieu de la mer
Après la fin du Moyen Âge, Concarneau conserve son statut de place de guerre, imposé pratiquement par la configuration du site. À la fin du XVIIe siècle, sur les indications de Vauban, quelques perfectionnements à la fortification sont apportés entre 1692 et 1699 (sur le bastion d’entrée de la ville close et la pointe du Fer à cheval) car la cité sert de point d’appui à la défense des côtes sud de la Bretagne. Par la suite, la Ville Close de Concarneau se trouve conservée et entretenue jusqu’à la fin du XIXe siècle par le Ministère de la Guerre qui l’utilise encore : certaines parties servent de caserne, d’autres de dépôts de munitions. Cependant la fonction militaire est de moins en moins pertinente face aux progrès de l’artillerie et, à l’extrême fin du XIXe siècle, la Ville Close n’est plus place de guerre. Quel peut alors être le devenir de ces fortifications ?
Les remparts Monuments historiques
En 1898, le Ministère de la Guerre décide de vendre certaines parties de la Ville Close de Concarneau suite au déclassement de la place forte. Commence alors une très longue série de négociations complexes entre les divers acteurs intéressés par les fortifications de Concarneau : le Ministère de la Guerre et la Ville de Concarneau, surtout, mais aussi le Ministère des Beaux Arts et de l’Instruction publique, qui se trouve impliqué quand la demande est faite de classer Monuments historiques les remparts de la Ville Close.
En effet, le 19 novembre 1898, une délibération du Conseil municipal de Concarneau mentionne une « protestation contre la vente de la Ville Close » :
« Le conseil municipal à l’unanimité s’associe aux pétitionnaires qui ont signé la requête à monsieur le Ministre de la Guerre en vue [d’empêcher ?] l’acte de vandalisme que constituerait la vente des remparts. Émet le vœu à l’unanimité que la cession des dits remparts ne soit pas remise par le département de la guerre à l’administration des Domaines pour les mêmes motifs que ceux exposés sur la pétition signée par 263 habitants »
Quelle est cette pétition, qui en est à l’origine ? Nous n’avons que de très faibles indices. Un article du journal Le Finistère, daté du 18 février 1902, fait référence à une communauté d’artistes peintres très liée aux milieux parisiens, qui séjourne dans les environs ou à Concarneau et apprécie ses paysages… et sa Ville Close. Sous la pression donc des habitants et des artistes, le 27 février 1899 le Ministère des Beaux Arts et de l’Instruction publique décide que
« conformément à l’avis émis par la Commission des Monuments historiques… les remparts de la ville de Concarneau sont classés parmi les Monuments historiques ».
Le classement définitif semble cependant n’intervenir qu’en 1913.
Les fortifications de la Ville Close de Concarneau ne servent donc plus à la guerre mais sont, à partir de ce moment, reconnues comme un patrimoine historique. Une valeur esthétique, voire artistique, est attribuée à ces remparts admirés aujourd'hui par tous, tant habitants que touristes qui visitent cette ville d’art et d’histoire.