Lagunes et marais côtiers ou une vie qui ne manque pas de sel…

Auteur : Aurélia Lachaud / janvier 2017
Protégés des assauts de l’océan, lagunes et marais côtiers sont des zones humides peu profondes où la hauteur d’eau et la salinité variables favorisent une biodiversité originale. La forte production biologique, proche de celle des estuaires, alimente une multitude de prédateurs dont poissons et oiseaux d’eau.

Des zones humides entre terre et mer

Localisés dans les indentations du Massif armoricain, les lagunes et marais côtiers sont plus nombreux et plus vastes dans les bas reliefs de la Bretagne sud. Ces zones humides sont protégées des rudesses de l’océan par des cordons littoraux de sable ou de galets. Ces milieux aquatiques restent cependant toujours alimentés, au moins périodiquement, en eau de mer. L’océan pénètre par percolation sous le cordon littoral, soit lors des tempêtes hivernales ou de grandes marées, soit par des chenaux de marée gérés par un système de vannes dans les marais aménagés.

Un chenal de marée. Crédit : Aurélia Lachaud.

Une flore et une faune spécialisées

Ces zones humides peu profondes se caractérisent par de fortes fluctuations du taux de salinité avec souvent une période d’assec estival. Seules quelques espèces adaptées, dites halophiles (de halos : sel et philein : aimer) ou subhalophiles, peuvent se développer dans ces conditions de vie très particulières. De l’automne au printemps, ces plans d’eau sont couverts d’herbiers aquatiques. Différentes espèces végétales peuvent se succéder en fonction de la variation de la salinité : Renoncule de Baudot, Zannichellie des marais et Zannichellie à feuilles obtuses, Potamot pectiné, Ruppie maritime puis Ruppie spiralée dans des conditions plus salées. Cette dernière peut produire jusqu’à 700 g de matière sèche par mètre carré et 600 graines au décimètre carré dans les bassins réservoirs des marais salants de Guérande.

Avec l’abaissement continu de la lame d’eau, succèderont sur les vases humides de petites plantes annuelles comme les salicornes ou encore le Chénopode à feuilles grasses.

Ces herbiers aquatiques et ces fonds argileux sont les supports de vie d’une faune liée aux milieux marins ou estuariens mais aussi d’espèces spécialisées des milieux lagunaires. Les insectes, crustacés, mollusques et vers composent l’essentiel de cette faune aquatique. Là encore les espèces sont peu nombreuses mais forment des peuplements denses. Les larves de chironomes, appréciées de nombreux prédateurs, peuvent compter jusqu’à 3 500 individus au mètre carré.

Une abondante ressource alimentaire mise à profit par les poissons et les oiseaux

Ces plans d’eau à forte production biologique sont des nurseries appréciées par les alevins de nombreuses espèces de poissons qui s’y développent avant de rejoindre l’océan. Une dizaine d’espèces les fréquente, comme le bar, l’anguille, la plie ou encore la sole. La crevette Palaemontes varians, qui compte jusqu’à 280 individus au mètre carré dans certaines lagunes, est une proie de choix.

Nidification de la spatule blanche à Guérande. Crédit : Aurélia Lachaud.

Cette ressource alimentaire abondante attire aussi de nombreux oiseaux d’eau. Plusieurs espèces patrimoniales y trouvent selon les sites des conditions favorables à la nidification et au nourrissage de leurs jeunes. L’Avocette élégante, l’Échasse blanche, le Chevalier gambette, le Gravelot à collier interrompu, la Sterne Pierre-Garin, la Gorge-bleue, le Tadorne de Belon sont des nicheurs habituels des marais côtiers du sud du Massif armoricain.

En période migratoire et en hivernage cette manne alimentaire concentre de fortes populations d’oiseaux inscrits à la Directive habitats. La plupart recherchent des proies animales : crustacés et petits poissons pour les hérons et spatules blanches, et divers invertébrés pour les limicoles. Les herbiers de ruppies nourrissent la Bernache cravant, et les graines des plantes halophiles, divers canards, comme la Sarcelle d’hiver.
Les roselières, riches en pucerons et autres invertébrés, accueillent des passereaux paludicoles  en nidification ou en étapes migratoires.

Limicoles à la recherche de proies. Crédit : Aurélia Lachaud.

Des milieux naturels sous haute protection

Ces sites bénéficient d’une multitude de classements et/ou protections qui sont autant d’outils favorables à la conservation de cette biodiversité largement dépendante du maintien de la connexion hydraulique avec l’océan et de la maîtrise de la qualité de l’eau.
La lagune est considérée comme prioritaire pour sa conservation par la Directive habitats car elle est rare et menacée au niveau communautaire. La plupart de ces zones humides appartiennent donc au réseau Natura 2000, comme le Marais breton (85/44), les marais salants de Guérande et du Mès (44), les marais du golfe du Morbihan (56), le marais de Trévignon (29), la mer Blanche à Mousterlin (29), le site de Kergalan en baie d’Audierne (29).
 

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Auteur : Aurélia Lachaud, « Lagunes et marais côtiers ou une vie qui ne manque pas de sel… », Bécédia [en ligne], ISSN 2968-2576, mis en ligne le 25/01/2017.

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Bibliographie

Proposé par : Bretagne Culture Diversité