L’Appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle

Auteur : Christian Bougeard / novembre 2016
L’Appel du 18 juin est un moment essentiel de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale marquant l’acte de naissance de la Résistance extérieure française, qui a eu des répercussions immédiates en Bretagne.

De Gaulle, un général peu connu lance ses appels à la BBC

Sous-secrétaire d’État à la Défense nationale et à la Guerre dans le gouvernement de Paul Reynaud, partisan de la poursuite des combats, le général de Gaulle rentré de Londres à Bordeaux où il a accepté une Union franco-britannique, le soir du 16 juin 1940, repart pour la capitale anglaise le 17 au matin quand le maréchal Pétain, chef de file des partisans de l’armistice, prend la tête du gouvernement. Reçu par Winston Churchill l’après-midi même, de Gaulle est autorisé à s’adresser aux Français sur les antennes de la BBC. Son premier texte, d’ailleurs partiellement censuré par un cabinet britannique qui souhaite encore ménager Pétain, est enregistré vers 18 h et diffusé vers 22 h le 18 juin. Le lendemain, des journaux français font état de ce premier appel qui a été peu entendu dans un pays en déroute avec des millions de civils sur les routes de l’Exode. Du 22 juin au 2 juillet, par la BBC, de Gaulle en diffuse des versions successives condamnant de plus en plus durement Pétain (avec l’accord des Britanniques). Ce qui passe pour être l’Appel du 18 juin est en fait un processus qui s’étend sur une quinzaine de jours : le texte n’en est définitivement établi qu’au début août dans une affiche de la France libre naissante.

De toute la Bretagne, des hommes rejoignent les Forces françaises libres (FFL)

Les allocutions radiodiffusées du général de Gaulle ont été entendues en Bretagne mais par combien de personnes ? À Vannes, le 23 juin, le général Kœchlin-Schwartz fait état dans son journal des deux premiers discours et de leur contenu ; sur l’île de Sein, plusieurs habitants ont entendu la déclaration du 22 juin, ce qui va conforter le départ vers l’Angleterre les 24 et 26 juin de 132 hommes de 14 à 54 ans (quatre sont déjà partis) sur quatre bateaux de pêche. Exemple emblématique célébré par la geste gaullienne, ces volontaires de l’île de Sein s’engagent dans les Forces navales françaises libres (FNFL) – dont ils constituent le premier noyau et 4,1 % des effectifs au 1er novembre 1940 – ou dans la marine marchande dont les convois ravitaillent la Grande-Bretagne.

À la mi-juin 1940, des centaines d’hommes, militaires, marins ou jeunes volontaires n’acceptant pas la défaite, ont quitté en catastrophe les ports de Bretagne et bon nombre, qui n’ont pas entendu l’Appel, rejoignent les Forces françaises libres (FFL) créées à la fin du mois de juin. La Bretagne va ainsi fournir de nombreux FFL ainsi qu’un nombre non négligeable d’agents des réseaux de renseignements travaillant pour le BCRA gaulliste ou pour l’Intelligence Service britannique.

En 1940-1941, les premières missions sont convoyées vers les côtes finistériennes par des pêcheurs bretons. Les Bretons, des hommes nés ou résidant en Bretagne avant ou après la guerre (sans la Loire-Inférieure), représentent 30,1 % de la première vague des engagés français dans les FFL (hors troupes coloniales), celle de 1940, et encore 11,2 % de la seconde en 1943. Avec 17,2 % des Free French (16,4 % pour l’Île-de-France) pour 5,5 % de la population française, la Bretagne est la première région de France à répondre à l’Appel du général de Gaulle (cinq fois plus que la moyenne nationale). Les Finistériens à eux seuls détiennent la palme patriotique avec 8,76 % des FFL (2 860 volontaires), les Côtes-du-Nord en fournissent 4,34 %, le Morbihan 2,42 % et l’Ille-et-Vilaine 1,68 %. La Basse-Bretagne littorale et portuaire (Brest, Douarnenez…) est surreprésentée au sein des FFL au point d’organiser en Angleterre, puis en Afrique du Nord, une amicale très active Sao Breiz evit ar Vro gallek, « Debout Bretagne, pour la France ». Animée, après son passage en Algérie, par le Dr Vourc’h de Plomodiern, dont toute la famille a participé à la résistance extérieure (trois fils engagés dans les FFL dont un tué en 1944 et fait Compagnon de la Libération) et à la résistance intérieure (réseau d’évasion par mer et de renseignement), cette association avait été créée à l’instigation du médecin général Sicé, l’un des premiers cadres de la France libre.

Revue des troupes par de Gaulle, tiré du film "Why We Fight : Divide and Conquer" de Frank Capra - Wikimedia

Gaullisme de guerre et Résistance en Bretagne

Dans le prolongement de l’Appel du 18 juin 1940, et malgré Mers-El Kébir, la forte écoute de la BBC est signalée par les autorités de Vichy dès 1940. Le « gaullisme » associé à « l’anglophilie » se développe massivement. Ces sentiments, souvent ambivalents, illustrent l’espoir ainsi que le rejet immédiat de l’occupant et « la germanophobie ». Souvent tournée vers Londres, une résistance intérieure précoce et multiforme, celle des réseaux et des mouvements, se structure progressivement en Bretagne en réponse à la phrase la plus fameuse de l’Appel du 18 juin : « Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas ». L’épopée du gaullisme de guerre, très présente en Bretagne après 1945, va se muer en un gaullisme politique au temps du RPF, puissant électoralement au début de la Ve République, à travers le gaullisme référendaire et présidentiel.

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Auteur : Christian Bougeard, « L’Appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle », Bécédia [en ligne], ISSN 2968-2576, mis en ligne le 28/11/2016.

Permalien: http://bcd.bzh/becedia/fr/l-appel-du-18-juin-1940-du-general-de-gaulle

Bibliographie

  • François Delpla, L’Appel du 18 juin 1940, Paris, Grasset, 2000.
  • Guillaume Piketty, « Appel du 18 juin », dans Dictionnaire De Gaulle, s. d. de Claire Andrieu, Philippe Braud, Guillaume Piketty, Paris, R. Laffont, 2006.
  • Christian Bougeard, La Bretagne de l’Occupation à la Libération (1940-1945), Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2014.

Proposé par : Bretagne Culture Diversité