Après les guerres de la Révolution et de l’Empire, les négociants landernéens comprennent que les toiles de lin n’ont plus de débouchés extérieurs. L’île de Saint-Domingue, première colonie française aux Antilles, recevant beaucoup de toile au XVIIIe siècle, est perdue. Avec la révolution libérale espagnole en 1820, les droits de douane sont multipliés et les colonies d’Amérique du Sud coupent les liens avec la métropole. C’est aussi la fin de ce marché.
Il ne reste que celui des armées, déjà fréquenté pendant les guerres. Mais la Marine exige de meilleurs produits, à qualité régulière et moins chers que les toiles rurales. Pour y répondre il faut passer à la mécanisation et renouveler la fabrication. Le groupe Radiguet-Goury-Poisson-Heuzé crée en 1821 une société de commerce et de production. Ils emploient très tôt la navette volante et la vapeur. Leurs toiles sont reconnues comme étant les meilleures par la Marine. Au milieu des années 1820, c’en est fini des toiles de chanvre artisanales de Locronan et, à la fin des années 1830, c’est le tour de la manufacture des « bretagnes », autour de Quintin, de disparaître.
Délaissant l’armement maritime, les Landernéens s’unissent à leurs proches concurrents de Landivisiau et Morlaix pour contrôler le marché. Ils fondent en 1845 la Société linière du Finistère, première entreprise privée du département avec jusqu’à 5 000 ouvriers. Ils créent à Landerneau une filature industrielle moderne, avec des machines britanniques.
Trop dépendante de l’État, qui absorbe 70 % de la production, et faute d’avoir pris le virage du coton à une époque de défection à l’égard du lin, elle ne franchit pas le siècle. En 1892 s’achève la seule expérience bretonne de travail industriel du lin.