La volonté de « faire breton » au travail a conduit les « filles de salle » du restaurant Chez Mélanie à Riec-sur-Belon (Finistère) à paraître habillées selon une mode locale. Mélanie Rouat, la patronne, leur commandait d’y porter une coiffe. Serveuses par le tablier et bretonnes par la coiffe, elles affichaient avec celle-ci la mode giz-fouen. Son architecture complexe de dentelles supportée par une pièce de lingerie ceinturée d’un ruban de couleur était tout à fait reconnaissable. Ses ailes relevées, dont la largeur et la disposition variaient suivant les villages des environs de Pont-Aven, se portaient avec une collerette tuyautée qui pouvait prendre des proportions spectaculaires. Mais des photographies des années 1930 montrent que des jeunes femmes venues des environs de Quimper portaient indifféremment la coiffe glazig pendant leur service, ce qui démontre que l’enjeu y était d’abord de « faire breton ». En proclamant ainsi l’identité bretonne, Mélanie Rouat, la patronne, dérogeait aux conventions vestimentaires de la restauration, à qui les fournisseurs de vêtements de travail (La Belle Jardinière, Braillon…) procuraient déjà des effets garantissant les normes d’hygiène alimentaire.
Cette promotion de la culture traditionnelle par le vêtement de salle avait acquis une telle réputation dans l’hôtellerie-restauration que, dans les années 1950-1970, de jeunes femmes de Riec-sur-Belon « faisaient les saisons » sur la côte d’Émeraude à près de 200 kilomètres, comme à Dinard, où l’hôtel-restaurant le Printania les a longtemps recrutées. De même, des conserveurs en recherche d’authenticité, comme Amieux ou Cassegrain à Nantes, affichaient volontiers les figures opulentes de cuisinières en costume breton.
