Valoriser et ménager les milieux
Profonds réaménagements
Si la France est occupée et organisée depuis des millénaires, la puissance des aménagements a récemment été multipliée grâce aux engins de travaux civils capables désormais de déplacer terre et mer. C’est surtout dans la période des « Trente Glorieuses » (1945-1973) que la France a été le plus profondément aménagée. Après les bombardements de la Seconde Guerre mondiale, de grands travaux sont réalisés pour reconstruire des villes. Surtout, de grands projets et schémas d’aménagements sont lancés.
Rééquilibrer la France
Il s’agit tout d’abord de renforcer la France industrielle et urbaine. L’ouvrage de J.-F. Gravier Paris et le désert français (1947) provoque la décision de créer des « métropoles d’équilibre » pour contrebalancer le poids jugé excessif de la capitale. Dans un contexte politique tendu (les communistes en France recueillent plus d’un tiers des voix, l’Europe est dans une situation de guerre froide, etc.), l’ambition est aussi de supprimer la « ceinture rouge » parisienne qui compte 500 000 ouvriers. On décide donc de déconcentrer les emplois industriels pour faire de Paris une puissance tertiaire.
Dans le premier cas, 8 métropoles d’équilibre sont créées, avec des spécialisations souvent marquées (l’aéronautique à Toulouse, la chimie à Lyon, etc.) et d’autres villes sont renforcées, comme Rennes avec les Télécom. La déconcentration industrielle permet d’ailleurs aux patrons d’avoir une main d’œuvre moins syndiquée et souvent payée un tiers de moins qu’à Paris.
Dans le second cas, on décide dès les années 1960 de construire à Paris le pôle tertiaire de La Défense et on commence à réserver les terrains pour construire « un grand aéroport international répondant à l’ambition et à la grandeur de la France » : ce sera Roissy-Charles-de-Gaulle.
Un développement planifié
Enfin, des grandes zones industrialo-portuaires sont implantées (Marseille, Le Havre, Dunkerque, etc.) pour favoriser la sécurisation de l’approvisionnement énergétique de la France, tout particulièrement en pétrole. L’estuaire de la Loire fait partie de ces « ZIP » et voit ses paysages traditionnels bouleversés tout en connaissant un essor économique conséquent. Quelques grandes zones touristiques sont enfin créées dans les montagnes (principalement dans les Alpes pour le tourisme d’hiver) et surtout sur les littoraux. Lancé en 1963, le plan Racine, ou schéma directeur d’Aménagement du Languedoc-Roussillon, bouleverse le paysage traditionnel en créant de grandes stations intégrées (La Grande-Motte, Gruissan-Plage, etc.). On constate une initiative de moindre envergure sur toute la côte landaise. La Bretagne échappe assez largement à cette planification mais reçoit toutefois quelques opérations touristiques ponctuelles dont la plus spectaculaire est l’aménagement du port du Crouesty.
Protéger les milieux naturels
Depuis les années 1970, on est un peu revenu sur cette tendance à aménager à tout va. Initiés dès 1964 (parc de la Vanoise), des parcs nationaux et régionaux se développent ; en Bretagne sont créés les parcs de la Brière et d’Armorique. De même on lance, le 10 juillet 1975, le Conservatoire du littoral et des rivages lacustres pour limiter une bétonisation excessive des côtes. En Bretagne, l’acquisition de certains terrains ainsi que d’autres mesures environnementales plus récentes ont ainsi permis de préserver ou de valoriser le patrimoine existant. Plus récemment, le parc marin d’Iroise a été lancé précisément pour associer l’indispensable valorisation aux dynamiques de préservation, ce qui n’est pas une mince affaire.
Docteur en géographie il est professeur à l'Université de Rennes 2 et à l'Institut d'études politiques de Rennes. Spécialiste de l'aménagement du territoire et du développement régional, ses travaux de recherche portent plus particulièrement sur les transports et la Bretagne. Il est l'auteur d'une dizaine d'ouvrages et de nombreux articles sur ces questions. Il préside également l'association Bretagne prospective-Breizh diawel.