De l'espace européen aux territoires de l'Union européenne

Jean Ollivro">

L’Europe, la première construction pacifique

On entend fréquemment que « l’Europe court de l’Atlantique à l’Oural ». C’est oublier que cette représentation fut évolutive (au ier siècle, le Romain Varron choisit de situer l’Europe au nord-ouest du Bosphore) et qu’il est fort difficile de la délimiter puisqu’il n’existe pas de discontinuité nette dans cet immense espace continental parfois nommé Eurasie.

Au lendemain des désastres de la Seconde Guerre mondiale, l’Europe est le premier continent où des États ont peu à peu choisi de s’associer autour de la paix et d’une dynamique de projet. Même si on peut critiquer ce mastodonte, l’Europe reste la première réelle construction pacifique de l’histoire de l’humanité. Après de multiples réalisations (la création de la CECA dès 1951, de la CEE en 1957 avec le traité de Rome), l’Union européenne est officiellement  créée le 1er novembre 1993 suite à la signature du traité de Maastricht. Il s’agit désormais d’une entité territoriale qui comprend 28 États membres, s’étend sur 4,5 millions de kilomètres carrés et comprend 508 millions d’habitants. On y constate au plan géographique la présence d’un axe lourd, parfois qualifié de « dorsale européenne » ou de « banane bleue », qui concentre l’essentiel de la richesse et des habitants. Si les Bretons ont tenté en 1973 de lancer un « arc Atlantique pour tirer sur la banane bleue », ce contre-pouvoir a exercé un rôle très limité.

Proche et lointaine à la fois

Si cette organisation supranationale semble parfois très lointaine, elle dispose d’une réalité symbolique : un drapeau, un hymne (l’Ode à la joie de Beethoven), une devise (« In varietate concordia » ; « Unie dans la diversité »). Elle dispose surtout de diverses prérogatives déléguées peu à peu par les États et qui lui permettent de battre monnaie (l’euro), d’avoir des représentations supranationales (le Parlement européen élu au suffrage universel direct, le Conseil européen, la Commission européenne, etc.) et d’exercer de multiples actions qui influencent largement nos vies quotidiennes. Son rôle est essentiel en ce qui concerne les dynamiques monétaires et économiques des différents États mais elle joue aussi un rôle intergouvernemental important pour la coopération policière et judiciaire en matière pénale, ou encore en matière d’affaires étrangères et de sécurité. L’Union européenne disposait ainsi en 2015 d’un budget de 162,3 milliards d’euros, et son action est par exemple déterminante pour l’agriculture ou l’aménagement des territoires.

Budget de l’Europe

Ainsi, 38 % de son budget est alloué à l’agriculture (70 % dans les années 1970), via le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) ou le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) qui concentrent respectivement 43,5 et 18,2 milliards. Dans toutes les régions, les décisions européennes sont essentielles dans ce domaine. L’Europe joue aussi un rôle très important pour la pêche (1,75 milliard).

De même, 37 % du budget est attribué à la « cohésion économique, sociale et territoriale » de l’Europe. Ces aides, dont nous reparlerons, sont essentiellement allouées aux régions moins développées ou « périphériques », dans un souci d’équilibre territorial, de cohésion et d’aménagement du territoire.

Notons également que 16 % du budget est consacré à l’essor économique interne (10,6 %) et à l’ouverture sur le monde (5,4 %). Dans le premier cas, l’Europe aide les activités de recherche et d’innovation (recherches spatiales par exemple), ou soutient la construction d’infrastructures de transport. Dans le second, elle intervient pour des pays voisins, déclenche avec d’autres pays des coopérations et projets de développement, favorise l’aide humanitaire, etc.