Guimard-Hinault et le nouvel âge d’or du cyclisme breton

Auteur : Yves-Marie Evanno / mai 2021

À l’issue du Tour de France 1958, Roger Glémée regrette, dans Ouest-France, qu’il « n’y [ait] pas dans notre région d’homme » qui puisse succéder à Louison Bobet et qu’à ce titre, l’avenir « est des plus sombres » pour le cyclisme breton. Fin connaisseur, le journaliste ne se trompe pas. En dépit de très jolis exploits, aucun coureur natif de la péninsule armoricaine ne parvient à peser sur les courses internationales avant les années 1970 et l’émergence de Cyrille Guimard puis de Bernard Hinault. La réussite du second est d’ailleurs indissociable du duo qu’il forme avec le premier. Ensemble, les deux hommes mènent le cyclisme breton sur le toit du monde comme l’avaient fait, 25 ans plus tôt, Louison Bobet et Jean Robic.

Avant même de devenir son directeur sportif, Cyrille Guimard s’impose comme l’un des confidents privilégiés de Bernard Hinault. C’est donc tout naturellement qu’en 1976 le jeune talent français accepte de rester au sein de l’équipe Gitane qui vient d’introniser le Nantais à sa tête. C’est le début d’une collaboration prolifique. L’alchimie entre les deux hommes est parfaite, comme le remarque, dès 1977, Roger Glémée. Selon lui, Bernard Hinault « a découvert en Cyrille Guimard un directeur sportif de son tempérament ». En effet, si Bernard Hinault possède le talent, Cyrille Guimard lui offre l’encadrement parfait pour qu’il puisse l’exprimer. Surtout, le Nantais parvient à contenir l’impulsivité du champion. Il n’hésite pas à agir contre son coureur lorsqu’il estime que c’est pour le bien de ce dernier. C’est ainsi qu’il ordonne à sa propre équipe, dans une scène surréaliste, de rouler contre le « Blaireau », lors du Tour de France 1979, pour le dissuader de poursuivre une échappée inutile. Souvent agacé par son aîné, Bernard Hinault est néanmoins parfaitement conscient qu’il doit une partie de ses succès aux conseils avisés de son directeur sportif. Durant près de sept ans, le duo règne sur le monde de la bicyclette.

Pourtant, l’histoire prend soudainement fin en 1983. La blessure de Bernard Hinault ayant propulsé Laurent Fignon sur le devant de la scène, Cyrille Guimard est confronté à un choix cornélien : choisir la star de l’avenir ou celle du passé dont il ignore la capacité à revenir au plus haut niveau. La relation entre les deux hommes se dégrade et le quadruple vainqueur du Tour de France pose un ultimatum aux dirigeants de chez Renault. Préférant conserver leur directeur sportif, ces derniers valident le divorce entre les deux Bretons. Deux ans plus tard, le come-back gagnant du « Blaireau » prouve que « Bernard Hinault pouvait cueillir encore quelques lauriers sans Cyrille Guimard », selon les mots de Cyrille Guimard lui-même. Si leur séparation prouve que l’un pouvait exister sans l’autre, leur association continue malgré tout de symboliser, 40 ans plus tard, le deuxième « âge d’or » du cyclisme breton.

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Auteur : Yves-Marie Evanno, « Guimard-Hinault et le nouvel âge d’or du cyclisme breton », Bécédia [en ligne], ISSN 2968-2576, mis en ligne le 27/05/2021.

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Proposé par : Bretagne Culture Diversité