Le contexte
L’édit d’union de 1532 est le dernier acte d’un processus qui a commencé en 1514 avec la mort de la duchesse Anne. Le 25 octobre 1514, Louis XII confie le pouvoir d’administrer la Bretagne à François d’Angoulême, futur François 1er. Devenu roi l’année suivante sous le nom de François 1er, ce dernier se fait accorder par son épouse Claude de France fille de Louis XII et d’Anne de Bretagne l’usufruit du duché (22 avril 1515) puis la pleine propriété à perpétuité pour le cas où elle décéderait avant lui sans enfants (28 juin 1515). Dans les faits, Claude a sept enfants dont trois fils. Par son testament en juillet 1524, elle transmet le duché à son fils aîné, le dauphin François. Cette disposition, conforme à ce qui était envisagé dans le contrat élaboré lors des fiançailles de Claude et François d’Angoulême en 1506, contrevient toutefois au traité de mariage qui avait été conclu entre la duchesse Anne et Louis XII en 1499 et qui voulait que le duché revînt au second fils né de leur union ou, à défaut de garçon, à leur fille. Attachés à cette dernière disposition, les États de Bretagne protestent contre le fait que le roi s’intitule dès 1524 « père et légitime administrateur de monseigneur le dauphin » et réclament pour duc le fils cadet, Henri.
Sans leur donner satisfaction, François 1er sait qu’il lui faut désormais résoudre la contradiction entre les dispositions de 1499 et de 1524 concernant la dévolution du duché. Vaincu et fait prisonnier à la bataille de Pavie en 1525, pleinement engagé dans les années suivantes dans une confrontation avec l’empereur Charles Quint, il ne peut se consacrer à nouveau à la « question bretonne » qu’au début des années 1530.
La promulgation de l’édit d’Union
Malgré les doutes exprimés par le procureur de Nantes, Julien Le Bosec, qui se serait plaint de n’avoir pas eu mandat pour discuter d’une telle question et demandé une consultation plus large, ce qui aurait entraîné une réaction courroucée du seigneur de Montejean qui présidait l’assemblée, celle-ci accepte le 4 août de présenter une requête au roi où quatre demandes principales sont formulées : que le dauphin soit reconnu comme duc et propriétaire du duché et fasse son entrée à Rennes ; que le roi garde l’usufruit et administration du duché ; que la Bretagne soit unie à perpétuité à la France ; que les privilèges du pays soient conservés. Les États acceptent donc le principe de l’union définitive du duché au royaume et annulent les dispositions du traité de 1499, en invoquant le fait qu’ils n’ont pas été consultés à cette occasion.
François 1er répond favorablement à leur demande par une déclaration promulguée le 7 ou 8 août à Vannes et signe l’édit d’union le 13 août à Nantes. Le même jour, le dauphin François est couronné duc à Rennes sous le nom de François III . Le 3 septembre 1532, au Plessis-Macé, François 1er promulgue l’édit d’union, cette fois à l’intention du royaume.
La Bretagne, une province privilégiée
Après un engagement de principe pris à Vannes dès le mois d’août, c’est au Plessis-Macé que François 1er décrit avec précision les privilèges de la Bretagne qu’il entend garantir. Dans le domaine des finances, il s’engage à ne pas lever de deniers dans la province sans le consentement des États. Il promet aussi que l’argent provenant des billots – une taxe pesant sur la consommation de vins – soit utilisé exclusivement pour faire face aux frais de réparation des fortifications urbaines en Bretagne. Sur le plan judiciaire, il confirme toutes les institutions bretonnes existantes – parlement, chancellerie, Chambre des comptes... –, reconnaissant ainsi le droit des Bretons à être jugés en Bretagne. Il interdit aussi de les traduire devant des tribunaux extérieurs, à l’exception des cas admis depuis le Moyen Âge, de déni de justice ou de mauvais jugement. Sur le plan religieux, il reconnaît qu’aucun non originaire ne puisse obtenir de bénéfice en Bretagne sans délivrance d’une autorisation exprès de sa part et qu’aucun étranger n’obtienne une telle faveur s’il n’appartient à son entourage. Cette énumération se termine par un article à caractère plus vague par lequel le roi confirme tous les autres privilèges dont « les États ont chartres anciennes et jouissance immémorable jusques à présent ».
Ces privilèges constituent l’enjeu des débats entre les États et la monarchie jusqu’à leur suppression dans la nuit du 4 août 1789.