La France dans la mondialisation
Toujours une grande puissance
La France est, nous dit-on, la 6e puissance mondiale et elle est un des acteurs majeurs de cette Europe mondialisée. Concernant les flux immatériels, sa situation n’est pas particulièrement originale, même si Paris est une place boursière de rang mondial. Celle-ci est considérée plus largement comme une « ville complète » (R. Camagni), tenant une place importante dans l’économie mondialisée, et au pouvoir décisionnel puissant. En effet, la France exerce au plan géopolitique, de manière directe ou indirecte, un rôle important en tant que membre du G5, et puissance nucléaire et militaire. Elle conserve une influence et des partenariats forts dans d’anciennes colonies et a récemment fait le choix d’intervenir militairement contre Daesh ou sur le théâtre d’opérations extérieures De même, elle dispose dans le monde d’une superficie maritime de 11 millions de kilomètres carrés qu’elle commence à mettre en valeur.
Les grandes entreprises dans la mondialisation
Au plan économique, l’originalité française est d’être un État dans lequel quelques grandes entreprises jouent un rôle essentiel. En gros, elles correspondent à ce qu’on appelle le « CAC 40 » (Dassault, Vinci, Lafarge, Alsthom, etc.) et nouent souvent de gros contrats à l’échelle internationale. Ce sont des entreprises très internationalisées qui ont leur siège à Paris (notamment sur le site de La Défense), réalisent 90 % de leur chiffre d’affaires à l’export et n’ont plus que 15 % de leurs effectifs en France.
Mais, contrairement à l’Allemagne par exemple, l’internationalisation économique de la France est peu réalisée par des entreprises de tailles intermédiaires (ETI), dont l’effectif se situe entre 250 et 4 999 salariés. On constate néanmoins l’existence en France d’entreprises de ce type, notamment en Bretagne dans l’agroalimentaire. Leur situation peut être rendue difficile par des évènements géopolitiques inattendus (le boycott russe par exemple), mais aussi parce qu’elles sont soumises à des normes plus exigeantes, même si ces dernières représentent aussi un atout en assurant la traçabilité des productions. Enfin, pour les PME-PMI, il est très difficile de se faire une place à l’international puisqu’elles ont, dans l’ensemble, une plus faible capacité de rayonnement, certaines ne disposant pas de service export. Toutefois, notamment grâce au numérique, des petites sociétés voire des individus fonctionnent aujourd’hui à l’international en vendant des produits ou des savoir-faire très pointus, en fonctionnant de manière dématérialisée, ou même en étant tout simplement connectées.
Première pour le nombre de touristes
Il faut souligner enfin que la France est une puissance culturelle et touristique majeure, les deux éléments étant liés. Grâce à son patrimoine exceptionnel, la France est la destination touristique la plus courue au monde (environ 80 millions de touristes par an). La notoriété touristique concerne tout d’abord la ville de Paris, puis des sites remarquables comme les châteaux de la Loire ou le mont Saint-Michel. Des régions sont aussi attractives, notamment la Provence et la Bretagne. En un siècle, l’activité touristique a connu une croissance exceptionnelle et, en 2015, on avait pour la première fois dépassé le chiffre du milliard de touristes sur la planète, l’Union européenne et la France étant, en raison de leurs richesses, fortement émettrices et réceptrices de flux. Cette activité renforcée s’explique par l’ouverture à la mondialisation, l’accessibilité grandissante aux transports et notamment au transport aérien, l’essor des pratiques touristiques dans les pays émergents (la Chine par exemple). Toutefois, il s’agit aussi d’une pratique fluctuante et incertaine, des guerres ou des attentats comme ceux de Paris pouvant soudainement restreindre la fréquentation.
Incertitudes de la mondialisation
La situation française illustre donc bien toutes les ambiguïtés de la mondialisation.
D’un côté, elle en bénéficie fortement pour imposer sa puissance diplomatique, être le siège d’évènements internationaux (la coupe du monde de football en 2010, la Cop 21 en 2015) et rayonner au plan touristique et économique. Certaines marques de luxe (Dior notamment, Guerlain) bénéficient désormais d’une notoriété internationale et d’autres groupes parviennent à être présents dans le monde entier (le groupe Yves Rocher par exemple).
De l’autre, le tissu économique français a été puissamment concerné par les délocalisations puisque le coût de la main-d’œuvre est jusqu’à 4 fois inférieur dans les pays pauvres. Il en ressort des difficultés récurrentes dans le domaine industriel, par exemple dans le domaine de la construction automobile.
Enfin, l’attractivité européenne suscite des mouvements difficilement contrôlables tels que l’arrivée de migrants et la multiplication des trafics clandestins (notamment le trafic de drogue). Avec ses risques et ses aubaines, la mondialisation produit aujourd’hui des effets inédits. Elle se superpose et interfère à la présence d’autres territoires qui, on l’a vu, exercent également un rôle crucial.
Docteur en géographie il est professeur à l'Université de Rennes 2 et à l'Institut d'études politiques de Rennes. Spécialiste de l'aménagement du territoire et du développement régional, ses travaux de recherche portent plus particulièrement sur les transports et la Bretagne. Il est l'auteur d'une dizaine d'ouvrages et de nombreux articles sur ces questions. Il préside également l'association Bretagne prospective-Breizh diawel.