La Charte culturelle bretonne est signée le 4 octobre 1977 entre l’État, l’EPR (Établissement public régional, nom de la Région avant le suffrage universel) et les cinq départements bretons. Annoncée sous chapiteau à Ploërmel par Giscard d’Estaing, le 9 février 1977, celle-ci reconnaît la « personnalité culturelle de la Bretagne » et engage la Région à gérer sa politique culturelle, répondant au « désir de respect de leur identité exprimé par la population bretonne et ses élus ».
Enseignement de la langue et de la culture bretonne
Dans le but de « reconnaître la valeur et la dignité » de la langue et de la culture bretonnes, la Charte propose de développer un enseignement en français portant sur les patrimoines culturels bretons dans le cadre de nouveaux programmes « dans tous les ordres d’enseignement dans l’ensemble de la Bretagne ». La Charte cite les recherches historiques à effectuer dans les universités et mentionne aussi les richesses du Pays gallo. L’essentiel des avancées, à la charge de l’État, porte sur la langue bretonne : enseignement facultatif en 6e et 5e, création d’une option (langue et culture bretonne) en 4e et 3e à la rentrée 1979 sur le modèle des langues vivantes ; cette continuité conduit à l’option breton du baccalauréat devenant « valable en tant que seconde langue » pour toutes les séries. Nouveauté d’importance, ces heures sont intégrées dans les horaires du collège et le service des professeurs volontaires. La formation de ces enseignants doit être assurée par divers stages gérés par le ministère de l’Éducation nationale.
Radio et télévision
La Charte s’avoue elle-même timide sur ce plan, pourtant « condition de l’épanouissement de la culture régionale ». Les mesures restent minimes : une émission de 20 minutes devient hebdomadaire en télévision, avec la promesse d’augmenter les programmes dès la fin 1978 !
Patrimoine culturel
L’effort en faveur du patrimoine avec la création d’un Atelier technique régional (association selon la loi de 1901) et la promesse d’intensifier l’aide financière et technique aux « associations culturelles bretonnes » (comme Kendalc’h) visent de même la reconnaissance de la culture bretonne.
Mention est aussi faite des chapelles bretonnes comme de « maisons de pays », sans oublier, entre autres structures, les centres d’éducation musicale...
Conseil culturel de Bretagne
La Charte propose la création d’un Conseil culturel de Bretagne de 61 membres représentant collectivités, villes et universités, associations culturelles (dix sièges), préfet de Région et Recteur d’Académie participant aux travaux. Un avis sera donné annuellement sur la répartition des crédits et de possibles suggestions sur « les grandes orientations de la politique culturelle de la Bretagne » auprès d’un Comité interdépartemental paritaire entre les Conseils généraux et l’État (dont les 5 préfets sur ses 9 représentants).
Institut culturel de Bretagne
L’Institut culturel de Bretagne annoncé concerne, outre la langue bretonne et le parler gallo, leurs littératures « tant orales qu’écrites », et divers champs de l’art et du patrimoine. Quant au financement, la part de l’État, équivalente à celle de l’EPR, sera de 3 millions de francs par an. Le budget de fonctionnement sera réparti pour moitié entre l’État (1,5 million de francs) et les Conseils généraux des cinq départements.
Bilan
Par-delà une Charte illustrant une nouvelle « démocratie française » à la mode, critiquée à gauche (notamment par l’UDB), il s’agit d’un net pas en avant qui améliore les diverses mesures accordées par les gouvernements gaullistes après Mai 68. La Charte se substitue ainsi en Bretagne à la loi Deixonne du début des années cinquante, seule disposition s’appliquant alors à plusieurs langues de France. Cette loi avait été votée de façon consensuelle mais a minima, après d’âpres débats, suite à des revendications remontant au moins aux années trente.
Le Conseil culturel de Bretagne a évolué pour devenir un organisme officiel du Conseil régional de Bretagne qui, pour l’essentiel, a pris le relais de la Charte.