De 1935 aux années 1950, dans les Monts d’Arrée, rares sont les noces où un accordéoniste n’interprète pas l’une des nombreuses « gavottes à Pierre Min », quand ce n’est pas Pierre Min (Yves Menez) qui les joue ! Ce compositeur de talent influencera fortement la pléthore de jeunes adeptes de l’accordéon chromatique que connaît la « Montagne » à cette époque. Ils perpétueront le style de jeu original et les airs de leur « maître », mêlant intimement art musical traditionnel ancien et technique « musette », avec une touche de swing. Un style qui connaît une nouvelle jeunesse depuis les années 2000, tandis que son créateur sort, à juste titre, de l’anonymat.
Yves Menez, né en 1905 à Plourarc’h, côtoie les nombreux chanteurs et clarinettistes locaux. Mais il émigre à Paris vers 1926, où il découvre l’accordéon chromatique ; une révélation ! Cette passion pour l’instrument va lui permettre de gagner sa vie dans les bals parisiens. En 1935, c’est un musicien aguerri qui revient au pays. Il s’installe avec sa femme au bourg de Scrignac ; elle tient un salon de coiffure et lui un bistrot. Bientôt il constitue un « jazz band » : l’Idéal Jazz (chromatique, saxophone, banjo), et toute la jeunesse danse sur sa musique. De nouveau installé à Paris comme maçon vers 1950, il ne ressortira plus son instrument : il faudra attendre les collectes menées auprès de ses « élèves », et notamment un disque consacré à Jean Coatéval en 1984, pour que ce grand compositeur populaire breton retrouve la place qu’il mérite.
Yves Menez, de Scrignac, à l’accordéon, et son orchestre appelé "Idéal-Jazz" vers 1935 : Gaston Thépaut (saxo), Jean Le Boulc'h (banjo), Louis Macé (violon), François Poupon (trompette), tous les quatre de Carhaix (coll. Dastum) et l’Idéal Jazz version 2012, 77 ans plus tard, qui réunit à l’initiative de l’accordéoniste Patrick Lefèvre trois autres accordéonistes : Régis Huiban, Jean Floch et Yann Le Corre, et les trompettistes Youenn Le Cam et Gaby Kerdoncuff, le saxophoniste Timothée Le Bours, le violoniste Pierre Stéphan, le banjoiste Roland Conq et le batteur Loïc Larnicol. Permanence du goût pour la gavotte swinguée en Bretagne !