Alain d’Albret est un puissant seigneur du sud-ouest de la France, né vers 1440, comte du Périgord, de Dreux, et vicomte de Limoges par son mariage avec Françoise de Blois-Penthièvre en 1456, sire d’Albret en 1471, lieutenant du roi en Guyenne. Fils d’un Gascon, Jean Ier d’Albret, il dispose aussi de solides liens familiaux en Bretagne par sa mère, Catherine de Rohan, fille d’Alain IX de Rohan et petite-fille du duc Jean IV. Demi-frère de Françoise de Dinan, comtesse de Laval, et oncle de François de Laval, il était aussi un proche parent du maréchal Jean IV de Rieux (dont la mère Jeanne de Rohan était la sœur de Catherine). Il fait partie de ce groupe d’intrigants extérieurs au duché qui gravitent dans l’entourage de François II puis d’Anne de Bretagne. Il entre dans la ligue du Bien public en 1465, puis en 1484 dans une nouvelle ligue contre le pouvoir royal. Au mois de novembre 1486, il participe à une coalition nouée contre les Beaujeu avec son fils Jean, roi de Navarre. Il obtient du roi de Castille une troupe de 1 000 hommes, commandée par Mosen Gralla, et en réunit lui-même 2 000. Avec sa compagnie de cent lances, commandée par Saint-Cirq et Forçays, il débarque dans l’embouchure de l’Odet, près de Quimper, le 20 mai 1488. Il participa à bataille de Saint-Aubin-du-Cormier le 28 juillet 1488. Pour obtenir son aide contre Charles VIII, Dunois lui avait proposé la main d’Anne, proposition prise très au sérieux selon le chroniqueur Alain Bouchart. Mais à 49 ans, ce père de sept enfants légitimes, au « teint couperosé, à la voix rauque, au regard dur, à l’humeur farouche », n’est, d’après l’historien du XIXe siècle Arthur de la Borderie, pas pour plaire à la jeune héritière. Vexé par le mariage avec Maximilien d’Autriche le 19 décembre 1490, il entre secrètement en pourparlers avec Pierre de Beaujeu et lui propose de livrer la ville et le château de Nantes avant la fin du mois de février 1491. Il demande en échange la restitution de ses biens confisqués, la promesse du roi de favoriser le mariage d’Anne avec lui ou son fils, 110 000 écus, une rente annuelle de 16 000 livres tournois, ainsi que diverses pensions pour lui ou son entourage. Ces conditions sont acceptées par Charles VIII le 2 janvier 1491 et par la suite, une lettre lui accorde une donation de 6 000 livres de rente du comté de Gâvres et de la ville de Fleurance, dans le comté de Gaure, en Gascogne, en compensation de ses droits sur le duché de Bretagne. Dans la nuit du 19 au 20 mars, après le départ du maréchal de Rieux, il se présente devant le château et s’y introduit avec des Français. Le 20 mars 1491, un traité est signé avec les capitaines français La Trémoille et Saint-André pour la reddition de la ville, ce qui lui permet de retrouver les bonnes grâces de Charles VIII.
La trahison d’Alain d’Albret
CITER CET ARTICLE
Auteur : Laurence Moal, « La trahison d’Alain d’Albret », Bécédia [en ligne], ISSN 2968-2576, mis en ligne le 4/04/2022.
Permalien: https://bcd.bzh/becedia/fr/la-trahison-d-alain-d-albret
Auteur : Laurence Moal
Laurence Moal est agrégée, docteure en histoire médiévale et enseignante à Brest. Elle a déjà publié aux Presses universitaires de Rennes : L’Étranger en Bretagne aux XIVe et XVe siècles (2008) ; Auray, 1364. Un combat pour la Bretagne (2012) ; Du Guesclin, images et histoire (2015) ; avec Michel Bochaca, Le Grand Routier de Pierre Garcie dit Ferrande. Instructions pour naviguer sur les mers du Ponant à la fin du Moyen Âge (2019) ; Duchesses. Histoire d'un pouvoir au féminin en Bretagne (2021). Aux éditions Gisserot : Histoire de Bretagne (2022) et Naufrages et naufrageurs (2023).