Le 15 juillet 1910, le journal L’Auto annonce qu’un « pénible accident » est venu contrarier le bon déroulement du Tour de France. La veille, le Rennais Adolphe Hélière est décédé, devenant ainsi le premier participant à mourir durant la célèbre épreuve par étapes. Ce titre qui, à nos yeux, peut sembler extrêmement maladroit, en dit finalement tout autant sur le regard porté à cette époque sur la mort, que sur la postérité promise au jeune sportif.
Âgé de seulement 19 ans, Adolphe Hélière est un modeste coureur amateur. Pour pouvoir prendre le départ de la course qui le fait tant rêver, il réunit toutes ses économies pour pouvoir, au fil des étapes, se loger et se nourrir. Nombre de ses proches ne le prennent d’ailleurs pas au sérieux. L’un d’entre eux confie à L’Auto que, peu de temps avant le départ, un ami lui avait lancé le pari qu’il ne dépasserait pas la troisième étape. C’était sans compter l’abnégation du Rennais qui arrive à Nice le 13 juillet, au soir de la sixième étape. Épuisé, il profite de la journée de repos du lendemain pour se délasser. En fin d’après-midi, alors que la température de l’air est encore très élevée, il plonge dans la Méditerranée pour se rafraîchir. Probablement victime d’une hydrocution, le malheureux se noie en quelques secondes.
En raison de la chaleur accablante, les autorités municipales décident d’inhumer provisoirement le corps à Nice, prenant de court la famille du défunt. Une souscription lancée par un journal local, L’Éclaireur de Nice, lui permet alors d’avoir une belle cérémonie d’enterrement. Ce n’est que quelques mois plus tard, dans une relative indifférence, que ses parents parviennent à réunir la somme nécessaire au rapatriement de sa dépouille à Rennes. Retombé très rapidement dans l’anonymat, sans plaque qui lui rende hommage, Adolphe Hélière n’en demeure pas moins une figure emblématique du Tour du France.