Le port est un espace segmenté, entre le bassin des hauturiers, et le bassin long réservé aux pinasses. « Le tri du chalutier et celui des pinasses, ce n’est pas du tout le même travail. Aux chalutiers, les gros poissons ; aux pinasses, beaucoup de petits poissons, de taille et poids différents, fallait aller vite », décrit Jeanne Le Clouérec, trieuse aux pinasses.
Deux quais, deux équipes qui ne se côtoient pas.
- Celui des bateaux industriels, les chalutiers pêche-arrière (la flotte la plus moderne à l’échelle nationale est lorientaise détenue par l’armement Jégo-Quéré). Les armateurs ont créé la société de déchargement lorientaise – la Sodelor – qui loue le matériel du port, recrute et rémunère le personnel de dockers et trieuses au forfait.
- Celui des pinasses ételloises ; les armateurs réunis au sein du Groupement professionnel des armateurs à la pêche de Lorient et d’Étel, délivrent une vignette aux trieuses par nuit qui atteste l’embauche. Ils payent les débardeurs et les trieuses à l’heure. Les équipes de tri sont constituées, jusqu’aux années 1973, par des contremaîtresses, selon des méthodes irrégulières et abusives.
Les distinctions se perçoivent également dans les conditions de travail : plus confortables et adaptées sur le quai des chalutiers, au matériel plus performant (tapis roulant par exemple) et par l’identité syndicale avec une dominante à la CFDT parmi les trieuses de la Sodelor et la CGT aux pinasses.
Sur le quai dédié à la pêche artisanale, les ouvrières trient des poissons nobles tels que merlu, merluchon, raie, lotte, langoustine, lieu jaune, dorade grise, cardine, dorade rose, germon, grondin rouge. Sur le quai dédié à la pêche industrielle, des espèces communes : lieu noir 27,5 %, merlan, cabillaud, lingue bleue, églefin, lingue julienne, aiguillat, maquereau, roussette, encornet/calmar. En 1972, les poissons nobles représentaient 24,82 % ; les poissons communs, 58,4 % par les chalutiers pêche-arrière.