De son nom scientifique Fratercula arctica qui signifie « petit frère de l’Arctique » en latin, le macareux appartient à la famille des alcidés qui comprend aussi les pingouins ainsi que les guillemots. Petit oiseau tout en rondeur, le macareux mesure environ 30 centimètres pour 60 d’envergure. Facilement reconnaissable à son bec coloré, à ses pattes palmés (dont paradoxalement il ne se sert pas pour nager lui préférant ses ailes), le macareux semble être enveloppé d’une cape noire -d’où probablement son surnom de moine- ne laissant découvert et blanc que le dessus de ses yeux, ses joues et son ventre.
L’animal a connu des périodes difficiles où sa survie s’est jouée de peu. En 1900, on recensait entre 10000 et 15000 individus des Sept-Iles jusqu’à Houat… Chassés pour leur chair et leurs œufs par les populations locales au XIXe siècle, ils furent aussi pris pour cibles par de riches braconniers venus d’ailleurs. En juin 1911, M. Loiseau rapporte : « La colonie de macareux de l’île Rouzic a été décimée. L’île offre l’aspect d’un véritable champ de carnage. Nous extrayons des trous des poussins morts, des œufs abandonnés et pourris ; nous trouvons une seule femelle occupée à couver et un adulte près d’un poussin de huit à dix jours. Nous apprenons alors par nos matelots que huit jours avant, deux ou trois individus sont venus de Paris et se sont fait débarquer dans l’île avec une caisse de 60 kg de cartouches. Ils n’ont quitté l’île qu’après avoir tout brûlé sur ces inoffensifs oiseaux, tués au moment où ils venaient au nid apporter la nourriture à leurs petits. Les cadavres des victimes (près de trois cents, nous a-t-on dit) ont été ramenés à Perros, et là, jetés sur la grève. Ces messieurs les chasseurs (!), fiers de leur tableau, n’en ont emporté qu’un ou deux exemplaires. Il paraît que ces vandales répètent presque tous les ans ces inutiles et stupides massacres. (…) ». On peut retrouver le récit de ce type de braconniers dans un article paru dans La chasse illustré du 7 mai 1881.
La chasse au macareux n’est pas spécifique à la Bretagne puisqu’il était consommé en Islande ou sur les îles Féroé. C’est cependant cet épisode de chasse de loisirs qui a contribué à la création de la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) en 1912 et en même temps à l’implantation d’une réserve ornithologique privée par cette même Ligue. La mobilisation des ornithologues a également permis de classer l’archipel des Sept-Iles, réserve naturelle nationale en 1976.
Aujourd’hui, bien qu’étant toujours protégée, la population de macareux moine diminue. Le centre de sauvegarde LPO de l’Ile-Grande (Pleumeur-Bodoù) n’a recensé durant l’été 2016 que 130 couples sur l’île Rouzic, seule île à les abriter, quand ils étaient plus de 8000 dans les années 1950. En cause, les multiples marées noires que la Bretagne a connues et aujourd’hui le réchauffement climatique. Les températures grimpant, les stocks de poissons migrent et l’animal est obligé de faire de plus en plus de route pour se nourrir ce qui l’épuise. Malgré une espérance de vie pouvant atteindre 25 ans, les effectifs sont d’autant plus faibles que l’espèce ne pond qu’un seul œuf par an de fin avril à mai. Qui plus est, les macareux nichant au sol, ils sont victimes des rats qui infestent les îles, ainsi que des goélands qui ont proliféré du fait de la multiplication des décharges à ciel ouvert. Charognards, ces derniers s’attaquent aux juvéniles pendant que les parents sont partis chasser le sprat.
Les lumières de la côte contribuent enfin à perturber les poussins qui, au premier envol, sont désorientés et attirés inexorablement alors qu’ils devraient se tourner vers la mer pour apprendre à chasser. En Islande, ce problème a donné lieu à une nouvelle tradition : des enfants partent à la recherche de macareux perdus qu’ils recueillent dans des cartons pour leur éviter une mort certaine avant de les relâcher le jour suivant.