Philippe II d’Espagne n’avait pas renoncé à envahir l’Angleterre. Mais l’échec de son Armada à la bataille de Gravelines, le 8 août 1588, l’avait convaincu de la nécessité d’utiliser les rades et ports de Bretagne pour regrouper et ravitailler ses escadres, rafraîchir ses troupes et trouver des pilotes familiers des parages septentrionaux. Par un effet contraire, les Anglais jugeaient vital pour la sûreté de leur commerce, et la sauvegarde de leur royaume, que les ports bretons ne puissent d’aucune façon tomber en des mains espagnoles. La situation en Bretagne donna aux Espagnols l’occasion de passer avec Mercœur, dès 1589 au plus tard, un contrat d’assistance mutuelle qui se concrétise, en 1590, par l’établissement de 3 000 hommes en la rade du Blavet. La place est aussitôt fortifiée. Les craintes anglaises sont renforcées par les accords signés en janvier 1591 entre Philippe II et Mayenne, par lesquels les villes maritimes ligueuses promettent de recevoir dans leurs ports les navires espagnols. L’intention de Philippe II était de prendre Brest. Il fait bâtir à cette fin la forteresse de Roscanvel.
La menace décide Elizabeth Ire à intervenir en Bretagne. Elle passe en ce sens un accord avec Henri IV et en respectera les termes, au contraire du roi, qui ne semble pas avoir clairement perçu ni les nouveaux enjeux militaires, ni l’importance géostratégique de la Bretagne. Aussitôt les troupes anglaises (2 500 hommes) débarquées, se succèdent entre les deux souverains les crises diplomatiques nées de leurs doctrines militaires antagonistes. La prise de Roscanvel par l’armée franco-anglaise (novembre 1594) permet enfin à la reine de rapatrier ses troupes. Affaiblis militairement et politiquement, les Espagnols conserveront les leurs en Bretagne en vue des négociations qui aboutissent à la paix de Vervins en mai 1598.
