Le relogement
Pour tous, la première urgence est de se loger. Déjà, pendant l’incendie, les couvents ouvrent leurs portes aux sinistrés. Certains, parmi les plus aisés, peuvent rejoindre leur propriété de campagne. D’autres sont hébergés dans le parlement lui-même, chez des parents ou amis ou trouvent un abri dans les quartiers populaires. Le vieux greffier de la municipalité, Gilles de Languedoc, qui demeurait en face de l’église Saint-Sauveur, se reloge dans la basse-ville inondable et peu considérée, avant de trouver un nouveau gîte sur la populaire place Sainte-Anne. Les faubourgs se remplissent d’habitants, qui y resteront parfois toujours, le centre reconstruit étant plus aéré et espacé et donc moins peuplé que ne l’étaient les quartiers incendiés. Mais le phénomène le plus original et durable consiste dans la construction de baraques qui vont finir, pour beaucoup, par devenir de petits immeubles. Si certaines sont bâties à l’intérieur de la ville, la plupart le sont autour de celle-ci, formant une ceinture plus ou moins continue d’habitat populaire au pied des murailles. Une vingtaine existe encore, du côté de la rue de la Visitation, bâties pour partie sur les anciennes douves comblées avec les décombres de l’incendie.
Les aides
Très vite aussi, tout un système d’assistance directe et indirecte se met en place. Dès le 28 décembre, les paysans des alentours doivent fournir de quoi nourrir les sinistrés. En janvier, le parlement rappelle à l’ordre les propriétaires des maisons épargnées qui pratiquent des loyers excessifs. Quant à la monarchie, elle envoie des aides financières, distribuées sur place principalement par les paroisses et les hôpitaux. Les frais de décombrement sont à la charge de l’État. Près de 1 300 foyers de sinistrés sont en outre exemptés du paiement de l’impôt de la capitation pendant deux ans. D’autres mesures allant dans le même sens sont aussi prises et l’historien Claude Nières résume bien la situation : « l’aide de l’État consistait moins en un apport d’argent frais qu’en une série de mesures financières et juridiques ayant pour but d’alléger les charges des constructeurs et leur faciliter le financement de leurs travaux ». La reconstruction est en effet très rapidement l’objectif prioritaire.
Inventaires après désastre
Les déclarations des sinistrés écrites dans les jours et semaines qui ont suivi le drame permettent de découvrir, ponctuellement, des récits vivants de l’évènement faits d’évacuations et de déménagements successifs et désordonnés au gré de l’avance du feu, avec la peur incessante de se voir voler ce que le feu n’a pas détruit. Certains racontent comment leur maison, quoique épargnée, a été endommagée dans le cadre de la lutte contre le feu. Nombreux sont aussi ceux qui dressent plus ou moins précisément la liste des pertes. Papiers, meubles, vêtements, réserves reviennent de manière incessante, mais, parfois, émergent des particularités : le marquis de Coëtmadeuc signale la perte d’une importante collection de peintures ; le président de Cornulier déplore la disparition de sa belle bibliothèque. Ici ou là, les déclarations révèlent aussi l’existence perdue de petites collections, de petits cabinets de curiosités, d’instruments de musique, etc. Plaintes aux accents possiblement exagérés tournant parfois au réquisitoire ou à la prière, récits à valeur cathartique, inventaires mobiliers et immobiliers parfois tatillons, ces déclarations renvoient à l’extrême diversité sociale et culturelle des victimes et, au-delà, au traumatisme collectif ressenti.