Pendant très longtemps, l’on ne s’est guère préoccupé des conteurs. Luzel est le premier à dresser en 1869 le portrait de l’une de ses principales conteuses : Marguerite Philippe.
« Jean-Louis Rolland m’a raconté que le vieux tisserand Iwan ar Floc’h de Treffrin lui avait dit quelle était l’origine des contes. A en croire les anciens, «tous ces contes avaient été inventés par une femme (Jean-Louis Rolland se la représentait évidemment comme une femme de son pays de Carhaix !) qui avait épousé un homme noir (eun den du). Cet homme noir ne voulait pas avoir d’enfant et lui avait dit que si elle en attendait un, il le tuerait... Et voilà qu’elle s’aperçut qu’elle était enceinte. Et elle se dit : - je vais lui raconter une longue histoire, un petit bout chaque nuit pour qu’il ait envie de savoir la suite et qu’il ne pense plus à l’enfant. Finalement il est né avant que l’histoire soit terminée et il l’a trouvé si beau qu’il n’a plus eu envie de le tuer !
On reconnaît évidemment l’argument des « Mille et une nuits » mais on ne saura sans doute jamais à quel moment et par quels cheminements ce récit est venu à la connaissance des conteurs bretons. »
Donatien Laurent.A l’exemple de Luzel, les collecteurs prendront l’habitude d’indiquer leurs sources, mais l’on ne dispose malheureusement que de peu d’informations sur la façon de conter, l’apprentissage, la constitution du répertoire… et le passage à l’écrit a généralement effacé les caractéristiques de cet art verbal.
Alors que l’on croyait l’oralité promise aux oubliettes de l’histoire, la voilà qui fait un retour en force depuis une quarantaine d’années. Les festivals, veillées, heures du conte se multiplient où toute une génération de néo-conteurs fait partager son univers merveilleux ou facétieux à un public ravi de cette relation directe et intime de la parole.
A la suite des Alain Le Goff, Albert Poulain, Jude Le Paboul… nombreux sont aujourd’hui les artisans de ce spectaculaire renouveau qui cherchent à adapter ce mode d’expression millénaire à notre monde d’aujourd’hui.